Coming-out d'écrivaine


J’écris.

Aussi loin que je me souvienne ça a toujours été quelque chose qui me plait.

Non je mens. Je me souviens quand j’ai commencé à savoir lire vers l’âge de 6 ans – ma mère dit toujours que j’ai su lire très vite – je disais partout que j’adorais lire mais que l’écriture m’ennuyait. Puis un jour ça m’a piqué, j’ai commencé à écrire dans des journaux intimes. Puis à 11 ans, j’ai écrit un « roman ». Il parlait d’une fille qui s’appelait Louise et qui avait 16 ans. Evidemment à l’époque c’était très influencé par les séries et par l’idée que je me faisais de la vie d’une adolescente de 16 ans. Mais je l’ai fini ce « roman ». Il doit être quelque part chez ma mère. C’était l’époque où je disais à tout le monde que je voulais être écrivain (on ne disait pas écrivaine). J’ai grandi. J’ai continué à écrire : des journaux intimes, des lettres, des débuts d’histoires, des débuts d’essai, des articles de blogs… J’ai toujours écrit sur à peu près tout ce qui m’intéressait : la politique, l’actualité, l’amour, l’amitié, la famille, le féminisme, les vernis, les vêtements, l’écologie…

Vers l’âge de 17 ans j’ai lu dans un magazine une phrase dont je me souviens encore aujourd’hui. Ecrire pour répondre au besoin que j’en ai. Je ne sais pas d’où ça vient mais ça m’a parlé. Ça me parle encore aujourd’hui. J’ai bien conscience que ça fait très « jeune fille émo de 15 ans » d’écrire ça aujourd’hui mais ça me parle encore beaucoup. J’ai toujours eu besoin d’écrire. Ça a toujours été un défouloir, une nécessité. Quand je vais bien, quand je ne vais pas bien. J’ai rompu avec des gens par lettres, j’ai avoué des sentiments… J’ai toujours été plus à l’aise avec l’idée d’écrire les choses plutôt que de les dire. Ca a été aussi une façon de conjurer mes peurs les plus profondes. J’avais lu cette histoire d’un mec qui disait qu’il voulait passer dans plein d’émissions de télé pour qu’il y ait des archives avec sa tête dedans quand il sera mort. Moi j’aime écrire et j’aime l’idée qu’un jour quelqu’un retrouvera tout ça – ou pas. J’aime me relire des années après. J’ai toujours aimé découvrir les lettres que mon grand-père envoyait à ma grand-mère. Je rêverais de tomber sur les journaux intimes de ma mère, de ma grand-mère… Je ne sais même pas s’ils existent. Je m’en fais une idée très romanesque et romantique. J’aime l’idée qu’après ma mort peut-être que quelqu’un (mes enfants si j’en ai un jour) retrouveront tout ça.

Alors j’écris. J’ai voulu devenir journaliste pendant un temps. Avec l’idée que je n’aimerais pas faire du journalisme « du quotidien », je me rappelle que je disais toujours que l’actualité en tant que tel ne m’intéressait pas plus que ça, que moi je voulais écrire les histoires des gens. Pas forcément à l’autre bout du monde, l’histoire de Micheline au bout de ma rue pouvait être fascinante. Je voulais mener des enquêtes, pas au sens policier du terme mais plutôt au sens sociologique. Je voulais étudier les gens, les populations.

Encore aujourd’hui c’est une part de mon métier que j’aime beaucoup : les histoires des gens.

Et je n’ai pas eu suffisamment confiance en moi pour « viser haut », pour passer le concours de sciences po avec sérieux, pour m’inscrire en fac de sociologie. J’ai fait du droit, parce que « et pourquoi pas après tout » et qu’une amie à moi en faisait aussi, que je me disais qu’en master 1 je rejoindrais sciences politiques. Puis, j’ai aimé ça le droit un peu, je n’étais pas mauvaise. C’est dur d’arrêter, de se réorienter, quand on n’est pas fondamentalement mauvais dans la matière qu’on étudie. En master 1, j’avais mes copains, mes habitudes, j’aimais ma fac, je n’ai même pas réessayé sciences po. Quant à la sociologie, je me disais déjà qu’il était trop tard.

Aujourd’hui j’aime mon métier d’avocate, avec des hauts, des bas. Mais j’ai l’impression d’être utile et intellectuellement ça me convient, ça calme mon cerveau bouillonnant.

Alors finalement zéro regret ?

Je n’ai jamais arrêté d’écrire. A la fac, j’écrivais dans le journal étudiant. J’ai écrit moins d’histoires, moins de début d’histoires avec le temps. Mais j’ai toujours eu des dizaines de carnets. J’ai toujours eu des blogs, que j’entretiens plus ou moins.

Bref j’écris.

Et j’en ai marre de ne pas avoir suffisamment confiance en moi. J’en ai marre de me dire que je ne suis pas légitime à le dire et à être lu. J’ai toujours tendance à minimiser le fait que j’écris. J’ai toujours très peur de publier un article par ici parce que j’ai peur qu’il y ait des retours négatifs. J’ai toujours peur qu’on me trouve bête ou ridicule. Je dis toujours que je me fiche d’être lu par personne ou par des milliers de gens. C’est faux. La notoriété en soi je m’en fiche. Mais pourquoi ouvrir un blog si ce n’est pas pour être lu ?

Dernièrement, j’ai pris conscience de certaines choses dans ma vie et je crois qu’il est temps d’assumer qui je suis, qui j’ai envie d’être, mes rêves d’enfants et de revenir à ce qui est important pour moi.
(la sagesse des 30 ans)

Alors qu’est ce qui est important pour moi ? D’écrire des choses.

Petite j’avais 12000 histoires en tête en permanence. Mes histoires tournaient beaucoup autour de l’amour, c’était très cliché. Aujourd’hui j’aimerais écrire pas mal d’articles par ici, et échanger avec celles et ceux qui voudraient en parler. J’aimerais beaucoup aussi je crois proposer des articles à quelques revues ou magazines. Par-dessus tout, j’aimerais parler de femmes, pas forcément des femmes connues, des femmes ordinaires, les héroïnes du quotidien. Je ne sais pas encore exactement comment. Je commence souvent des dizaines d’articles, de romans, de portraits et puis j’abandonne, insatisfaite du format ou de mon écriture. Je n’ai pas encore trouvé ce qui me convenait réellement mais j’ai des idées qui me trottent dans la tête. Et ça m’enthousiasme réellement. Je passe mon temps à admirer des femmes qui – selon moi – sont formidables : Gisèle Halimi, Benoîte Groult par exemple. Je me sens très proche d’elles, même si on n’est pas du tout de la même génération. Benoîte Groult essentiellement parce qu’elle me rassure, elle a sorti ses premiers livres autour de 40 ans et Gisèle Halimi parce qu’elle est un modèle en tant qu’avocate. Je suis des dizaines de nanas inspirantes sur les réseaux sociaux, des militantes, des dessinatrices, des autrices etc, et je crois que j’ai réalisé il y a peu que ces femmes n’étaient pas fondamentalement différentes de moi. Alors peut-être qu’elles ont du talent et que je n’en ai pas. En réalité je m’en fiche de « réussir ». J’ai juste envie de tenter de faire ce qui me plaît. Et si ça plaît à d’autres tant mieux.

J’écris. On a le droit de me dire que c’est nul. On a le droit de me dire que ce n’est pas intéressant, pas drôle, pas pertinent, que le style est mauvais. Je suis prête à entendre les critiques. Et à envoyer bouler les gens qui iraient trop loin. Je crois que je le fais avant tout pour moi. Je ne sais pas ce que deviendra cette passion de l’écriture, enfin ce besoin plutôt, si ça deviendra quelque chose un jour. 

Mais j’écris et c’est chouette. 

Commentaires

Articles les plus consultés